Vivre avec soi…
Hummmmm, Vivre avec soi ….
Choisir, autant que possible, la dérision, l’humour, refuser la complaisance qui consiste à s’apitoyer sur soi, convoquer l’éloquence pour désamorcer conflits ou colère, voici quelques-uns des choix vers lesquels je me tourne quand l’adversité, quelle que soit son ambition, tente de m’entrainer dans ses sombres desseins.
Pour cela, j’ai cet outil extraordinaire : L’écriture ! D’une pointe rageuse, avec éloquence, ou humour, en pouffant de rire parfois, je laisse courir sur mon clavier deux doigts créateurs de mots, qui dissolvent peines et doutes, m’allègent ou me réconfortent.
Et puis, soit je garde cette prose pour moi, soit je la partage sur les réseaux sociaux. Et je fais ainsi profiter ma communauté de mes p’tites aventures, que je tiens ainsi à garder dérisoires tout en faisant pouffer de rires mes amis. Ceux-là même qui me font l’honneur de réagir à mes humeurs, drôles ou sarcastiques.
C’est ainsi qu’il y a quelques jours, dans le cadre d’une de mes activités qui consiste à accueillir des touristes et veiller à leur bien-être, j’ai eu affaire à un spécimen assez exceptionnel dont l’histoire, une fois racontée sur mes réseaux, a suscité nombre de réactions dont une qui est une leçon que je garderai précieusement.
Cette Américaine donc, avant même son arrivée, semblait parée de toutes les caractéristiques de la cliente difficile ! (Je me contenterai de conserver cet adjectif pour rester dans la bienséance).
Elle croulait encore sous les 50 mètres de neige de l’état de New-York qu’elle m’inondait déjà de questions quant à la perfection de son prochain séjour en Guadeloupe ! Du linge de maison à l’hygiène en passant par les mesures prises pour sa sécurité et l’amabilité des chauffeurs de taxi, tout y passa ! Elle termina, bien sûr en s’enquérant de la température de l’eau et de la clémence de la météo durant son séjour. Stoïque, je restai professionnelle et répondis à toutes ses questions, précisant, néanmoins, que mes pouvoirs n’étant pas illimités, je ne garantis pas que la mer fut à température idéale et constante tout le long de sa semaine de vacances et, quant à la météo, elle m’en voyait désolée, mais je n’avais pas encore acquis la puissance nécessaire à la maîtrise du temps ! Je la rassurais quand même sur le fait que, la Guadeloupe jouissant du privilège d’être posée sous les tropiques, il y avait néanmoins une chance que la neige qui sévissait actuellement à New-York, ne s’évapore quelque part entre cet état et Pointe à pitre.
Jusqu’à la dernière minute avant le décollage, je fus assaillie de questions (5 appels depuis son siège d’avion) !
Je me préparai donc psychologiquement à la semaine pas très joyeuse qui s’annonçait ! Je sentais que ces 6 nuits et 7 jours seraient comptabilisés, heure après heure jusqu’au départ de ma déesse de cliente.
A son arrivée, le ciel m’accorda exactement 10 minutes de répit. Ce fut le temps durant lequel elle s’extasia sur la beauté du logement et la splendide vue sur mer. Puis, sans crier gare, et sans même me laisser le temps de digérer ces exclamations de satisfaction, elle entra dans la danse des doléances : Il y avait quelques grains de poussières inacceptables, une ampoule, un peu chancelante (entourée de 6 autres parfaitement fonctionnelles) qui allait la plonger dans le noir, ce qui semblait la terroriser, la télévision avait le tort de ne pas avoir exactement le même fonctionnement que celle de sa chère Amérique, les prises électriques exigeaient un adaptateur que j’étais priée de lui fournir sans délai, et, horreur absolue, le fournisseur d’internet avait eu l’audace d’être défaillant alors même que son auguste personne débarquait sur l’île ! Même mes doigts, qui en ce moment courent sur le clavier sont à court de mots pour décrire la scène qui s’ensuivit ! Entre colère, indignation et apitoiement, elle sembla vivre le plus grand drame non seulement de sa vie à elle, mais que le monde entier eut connu.
La coupure internet dura 7 heures, et eut lieu pendant les heures sensées être de sommeil, mais ceci n’était qu’un détail, incapable de stopper l’indignation.
Alors que j’avais relaté cet épisode sur un réseau social, les réactions furent diverses, entre fous rires et encouragements.
Et, au milieu de ces échanges, cette pépite, offerte par Valérie que je cite :
“Et dire que cette personne vit en permanence avec… Elle-même.”
Voilà, quelques mots, tous simples, mais tellement profonds ! Par ces mots, s’impose une évidence : Cette personne, où qu’elle aille, quoi qu’elle fasse, s’efforcera de trouver des raisons de ne pas être heureuse ! Quelle désolation ! Quelle tristesse ! Cette part qui nous appartient de garder ne serait-ce qu’une petite lueur pour éclairer les ombres devant nous, elle la rejette, l’ensevelit sous des couches de regret ou d’espoir d’un hypothétique « mieux » ! Alors, oui, elle n’en n’est qu’à son second jour, il lui reste encore 5 jours, soit 120 heures et 7200 minutes à passer dans ce splendide studio et à réussir à trouver des raisons de se plaindre, mais moi, mon défi sera de vivre avec moi, pendant tout ce temps, comme j’aime le faire, dans la joie et dans le constat que le meilleur est toujours possible et souvent, à porter de cœur…