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Niki de Saint Phalle, ou la revendication d’une artiste autodidacte féministe au Grand Palais

Niki de Saint Phalle, ou la revendication d’une artiste autodidacte féministe au Grand Palais

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Niki de Saint Phalle in Los Angeles, 1962
Niki de Saint Phalle à Los Angeles, 1962

Catherine Marie-Agnès Fal de Saint Phalle (1930-2002), dite Niki, est l’une des plasticiennes, peintres, sculptrices et réalisatrices franco-américaines les plus talentueuses et populaires du XXème siècle. Dès son plus jeune âge, elle souhaite se détacher de la voie toute tracée par sa famille aristocratique, celle d’une bonne épouse discrète et distante, à l’image de sa mère. Une image qu’elle rejette avec force : « Je ne vous ressemblerai pas, ma mère. Vous aviez accepté ce qui vous avait été transmis par vos parents : la religion, les rôles masculin et féminin, vos idées sur la société et la sécurité ». Au contraire, elle se rêve en héroïne, en exemple féminin à suivre : « Qui serais-je ? George Sand ? Jeanne d’Arc ? Napoléon en jupons ? ». Malgré tout, à tout juste 19 ans, elle épouse le futur écrivain Harry Mathews et commence à peindre ses premières huiles et gouaches, en complète autodidacte. Une activité artistique qui « calmait le chaos qui agitait mon âme. C’était une façon de domestiquer ces dragons qui ont toujours surgi dans mon travail », confiait-elle. Un chaos qui provient de son enfance après avoir été violée par son père à l’âge de 11 ans. En 1952, après la naissance de son premier enfant, Laura, la famille Mathews quitte les Etats-Unis pour s’installer à Paris. Nikki de Saint Phalle se sépare de son mari en 1960 et s’installe avec Jean Tingueley, son partenaire artistique.

Elle participe à sa première séance de tir où il faut tirer à la carabine sur des reliefs couverts de plâtre et faire éclater les sachets de couleurs cachés sous le plâtre, en éclaboussure sur le tableau. Une technique dont elle affectionne la violence et qu’elle commente ainsi : « J’ai eu la chance de rencontrer l’art parce que j’avais, sur un plan psychique, tout ce qu’il faut pour devenir une terroriste. Au lieu de cela, j’ai utilisé le fusil pour une bonne cause, celle de l’art ».

Féministe engagée, Niki de Saint Phalle fait de la femme le sujet principal de ses œuvres, notamment dans ses sculptures en papier mâché et laine, puis en résine ou en plâtre peint. Elle sculpte Déesses,  Accouchements et Nanas. Ces dernières, aux corps colorés et généreux, à la fois joyeuses et puissantes, incarnent un monde nouveau où la femme détiendrait le pouvoir. L’artiste réalise la plus grande Nana intitulée Hon (« Elle » en suédois) pour le Modena Museet de Stockholm. Pour Niki de Saint Phalle, « le temps est venu d’une nouvelle société matriarcale. Vous croyez que les gens continueraient à mourir de faim si les femmes s’en mêlaient ? Ces femmes qui mettent au monde, ont cette fonction de donner vie – je ne peux pas m’empêcher de penser qu’elles pourraient faire un monde dans lequel je serais heureuse de vivre ». Une réflexion qui exprime sa volonté de prouver que les femmes sont aussi, voire plus, capables de créer, de diriger que les hommes.

Ce besoin de faire ses preuves en tant qu’artiste féminine lui tient tellement à cœur, qu’elle devient, en 1978, la première femme à entreprendre une œuvre architecturale publique, complexe et ambitieuse : le Jardin de Tarots, en Toscane, Italie. Inspirée par l’architecte Antoni Gaudí et le parc Güell à Barcelonne, Niki de Saint Phalle va réaliser son œuvre majeure entièrement autofinancée grâce à la vente de produits dérivés et d’édition. En plus de prouver qu’elle en est capable, ses grands projets architecturaux (fontaines, parcs pour enfants, sculptures géantes) expriment aussi son désir de rendre heureux et de s’adresser à tous. Ce qui constitue, selon elle, le but final de toutes ses créations et de l’art en général.

L’hommage mérité que lui rend le Grand Palais, accueille jusqu’au 2 février 2015, une grande exposition autour de cette artiste aux multiples facettes, de ses nombreuses œuvres diverses et populaires. Cette rétrospective met en lumière plus de 200 œuvres et archives à travers un parcours de 2000 m2 jalonné d’écrans montrant l’artiste commentant son travail. Ce dernier vogue entre violence et chaos d’un côté, et joie de vivre de l’autre, en témoignage de la dualité de sa créatrice. Niki de Saint Phalle se veut à la fois critique, exemplaire, défenseuse et pionnière, et n’hésite pas à aborder la question raciale, à défendre les droits civiques, utilisant l’art pour sensibiliser le grand public au danger du sida. Une véritable porte-parole avant-gardiste et féministe de la deuxième moitié du XXe siècle.

L’exposition sera également présentée au musée Guggenheim de Bilbao du 27 février au 7 juin 2015.

Plus d’infos : www.grandpalais.fr/fr/evenement/niki-de-saint-phalle

Par Mistoura Yessoufou.

  • Niki de Saint Phalle, ou la revendication d’une artiste autodidacte féministe au Grand Palais
  • Tree of liberty, 2000-2001
  • Californian Diary (Black is Different), 1994
  • Cheval et la mariée (LC)
  • Jardin des tarots
  • La tempérance, Modell fÅr "Jardin des tarots"

Art, Féminisme, Grand Palais, Niki de Saint Phalle


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