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Crescence Bibi-Mani

Qui est Crescence ?

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Elle s’appelle Crescence Bibi-Mani. Son nom ne vous dit peut-être rien, et pourtant… Tous les amoureux de mode connaissent son joli minois, son élégance, sa démarche légèrement chaloupée, sa façon si unique de rendre hommage au génie créateur du styliste dont elle porte le vêtement. Discrète, humble et toujours accommodante, Crescence a offert son talent aux plus grands, du milieu des années 80 à nos jours. « Belle un jour, belle toujours », pourrait-on dire de celle qui est encore demandée pour des publicités, des showrooms ou des photos. Carven, Torrente, Yves Saint-Laurent, Louis Feraud, Guy Laroche, Loris Azzaro, Weill… ont été touchés par la grâce et le professionnalisme de cette liane venue tout droit du Cameroun pour « devenir mannequin à Paris », laissant derrière elle sa fille unique et sa famille.

Je suis née sous un cerisier sauvage en pleine brousse. J’ai été accueillie par les étoiles et les grillons dans la nuit. C’est original… 

 Toute la vie de la 7ème enfant d’une famille qui en comptait 9 est parsemée de particularités. Un père mécanicien et une mère commerçante dans le cacao, Crescence est née dans les années 60, dans le village de Ngomedzap, à 80 km de Kribi, sur la côte Atlantique. Elle y vivra heureuse jusqu’à l’âge de 12 ans, avant d’aller rejoindre Tamba Véronique, sa sœur aînée, à Yaoundé. C’est de là qu’a germé en elle l’idée de « gagner (sa) vie en portant des vêtements ». Femme d’affaires aguerrie, cette sœur qui vend des habits constate qu’elle vend mieux ce que Crescence porte. Très vite, tout son entourage lui dit qu’elle réussirait, si elle devenait mannequin. La jeune fille a alors 14 ans et entend le mot « mannequin » pour la première fois de sa vie.

Grâce à Tamba Véronique, elle débarque à Paris. Tous les espoirs sont permis. S’il elle suit une formation exigeante et complète au métier de mannequin en 1985 chez « Simone », c’est sur le terrain qu’elle forge ses premières armes de professionnelle. Elle apprend à marcher sur les podiums, à « se vendre » lors des castings, à poser pour des photos de magazine avec les grands photographes du moment. Elle veut l’excellence et y arrive. Son agence lui rase les cheveux à la Grace Jones. Il faut se distinguer dans ce métier. « Un mannequin doit se faire remarquer dès qu’elle franchit la porte », souligne celle qui exerce son même métier-passion depuis bientôt trente ans. Très vite, la chance va lui sourire et elle sera souvent remarquée et choisie parmi des dizaines d’autres, pour des campagnes de publicité ou pour être mannequin cabine. La rigueur que se fixe Crescence paye. Le conte de fée prend formes et couleurs. Entre les dunes de Marrakech pour des photos mode, des défilés prestigieux, des voyages inespérés, des rencontres, elle vit sa vie et vit son rêve de petite fille.

J’ai très vite compris qu’être belle comportait aussi des dangers. J’ai failli être enlevée deux fois. C’est un métier à risque où la frontière avec la prostitution est très mince. Il ne faut pas tomber dans les nombreux pièges. 

Ayant une haute opinion de son métier, elle évitera, soigneusement, tous les pièges. Et préférera être une ambassadrice de la beauté, avec fards, mais sans tâche.

Il est important pour moi d’être un exemple autant sur le plan physique que moral. J’ai toujours voulu faire mon métier avec perfection, et avec le sourire. Une fois rentrée chez moi, j’enlève tout le maquillage, et je deviens une maman ordinaire et aimante.

Ses collègues disent de la belle Camerounaise que sa beauté n’a d’égal que sa gentillesse, son côté positif et solidaire, sa valorisation du travail d’équipe. «  Si elle n’est pas aussi connue que ces consœurs malgré sa riche et belle carrière, c’est parce qu’elle a toujours été discrète », précise Eric Enyéngué, ancien mannequin qui a souvent incarné dans le métier, le couple parfait avec Crescence pour des publicités télé ou dans la presse. Il garde d’elle un souvenir lumineux. « Pour reprendre une expression moderne, poursuit-il, elle n’a jamais voulu faire le buzz. Crescence a pour habitude de faire son travail avec un grand professionnalisme et ensuite de rentrer directement chez elle, sans s’exposer. »

De nature timide, Crescence a dû se surpasser pour réussir dans ce milieu si particulier de la mode à Paris. Ce n’était pas non plus dans sa culture de s’exhiber devant des inconnus. Comme dans les salons de prêt-à-porter où on lui demande de se mettre en lingerie : « Défiler sur un podium et se montrer dans un salon sont deux choses différentes. Je n’ai pas pu défiler en lingerie… »

Aujourd’hui, celle qui a tout appris à force de travail veut transmettre son savoir et son savoir-faire :

Le mannequinat est un métier très physique où il faut avoir une bonne forme. C’est aussi intense, pressant. Il arrive que vous ayez à défiler pour trois maisons dans la même journée et à vous changer tellement de fois que vous ne savez plus où vous habitez! Quels que soient les malheurs que vous avez à traverser, vous devez aller défiler comme si de rien n’était, après avoir pleuré en cabine ou après avoir enlevé votre atèle. Quoi qu’il arrive, un mannequin défile !

Dame chance a très souvent été sur le chemin de cette femme douce à la beauté racée. Une semaine après sa formation en arrivant du Cameroun, elle n’a pas où dormir. C’est une compatriote, rencontrée par hasard dans le métro parisien, qui lui prêtera main forte et lui offrira le gîte et le couvert. C’est toujours avec tendresse et émotion qu’elle se souvient de ceux qui ont permis à sa carrière de naître et à son talent d’éclater au grand jour. Il est temps aujourd’hui de raconter son histoire de femme, de mère et de mannequin international, à titre d’exemple, pour susciter l’émulation chez les plus jeunes. Transmettre le flambeau. Et prévenir des dérives du métier.

Par Claire Renée Mendy

Cameroun, Crescence, Destin, Top model


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